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Photo du rédacteurLatifa Anishna

Témoignage : Étudiante le jour. Escorte girl la nuit

Dernière mise à jour : 7 sept. 2023

Lors d'une soirée entre amis, j'ai renconté Carlie, 22 ans, est une jeune fille à la vie très particulière. Etudiante en fac de médecine le jour, elle occupe ses nuits à une activité peu commune : C'est un escorte en suisse.


Entre préjugés et réalités, elle nous raconte son quotidien, au cœur d’un monde finalement assez méconnu.





« C’est un échange attrapé au vol qui a brisé tous mes préjugés »


« Je ne suis pas devenue escorte sur un coup de tête.


A vrai dire, je n’y avais encore jamais pensé avant de commencer mes études supérieures.


Je suis arrivée à Genève à mes 19 ans.


Je viens de la campagne suisse, mes parents travaillent dans l’agriculture : autant dire que je n’étais pas du tout une fille de la ville !


Mon arrivée à Genève m’a transformée : je faisais enfin les études dont j’avais toujours rêvé, j’ai découvert un tas de gens différents, un monde que je ne connaissais pas.


Malheureusement, le coût de la vie à Genève n’était pas le même que dans les campagnes, et je me suis vite rendue à l’évidence : il allait falloir que je m’investisse pour aider mes parents à financer ma vie d’étudiante. Passionnée par le social et les relations humaines, j’ai pour la première fois pu observer le monde des escortes lors d’une conversation surprise dans un bar, avec des amies.


C’est cet échange attrapé au vol qui a brisé tous mes préjugés : la femme semblait à l’aise, et n’avait pas l’air de se forcer pour se rapprocher de l’homme qui semblait à son écoute, et d’une infinie douceur.


Après cette soirée, l’idée s’est installée dans un coin de ma tête, et ne m’a plus quittée. »


« J’étais libre dans mon travail, et cela me plaisait »


« Après quelques semaines de renseignements sur le sujet et de profonde réflexion, j’ai décidé de sauter le pas. Je me suis inscrite dans une agence, car je trouvais ça plus sécurisant que de me lancer en solitaire. J’ai eu peur au début, je l’avoue : j’avais l’impression qu’à tout moment, je pouvais me retrouver face à un pervers, ou un homme dangereux.


J’ai mis quelques temps à comprendre qu’en réalité, je pouvais choisir la manière dont je travaillais. Je pouvais échanger des mails avec la personne afin d’apprendre à la connaître, décider de travailler ou non selon mon état de santé ou mon emploi du temps à l’école, refuser un rendez-vous, en privilégier un autre. J’étais libre dans mon travail, et cela me plaisait.


J’ai commencé à apprécier ce que je faisais, et donc à l’assumer. Je n’avais plus peur de croiser quelqu’un de mon école lorsque je travaillais, je ne me cachais plus dans la rue. Je m’épanouissais au contact des gens. »


« J’ai eu accès à des lieux dans lesquels je n’aurais jamais pensé mettre les pieds »


« J’ai aussi pu mettre un pied dans ce monde qui me faisait rêver mais que je n’avais pas les moyens de m’offrir auparavant. Etre escorte à Genève, c’est travailler dans une ville riche, culturelle, pleine de ressources et de personnes intéressantes.


J’ai découvert des tas d’horizons différents, eu accès à des lieux dans lesquels je n’aurais jamais pensé mettre les pieds un jour.


J’ai mangé dans de très bons restaurants et dormis dans de superbes hôtels étoilés. Bien sûr, ce n’est pas comme ça tous les jours : mes clients ne sont pas tous de riches entrepreneurs !


Malgré cela, le fait d’être inscrite dans un agence reconnue me profère un certain standing et m’a évité de tomber sur des personnes trop louches. Je découvre la vie du grand Genève, tout en gagnant assez d’argent non seulement pour aider mes parents à payer mon loyer, mais également pour en garder un peu de côté.


Lorsque je compare ce que je gagne avec ce que mes amis touchent en ayant des jobs étudiants plus classiques, je me rends compte que je n’ai pas eu tort de me lancer dans cette aventure, ma foi plus fructueuse et moins monotone qu’un job de serveuse. »


« La plupart du temps, il n’y a même pas de sexe »


« Aujourd’hui encore, j’ai des clients de tout âge, de tous horizons. Il y en a que je retrouve régulièrement, et d’autre qui sont juste de passage. Il y a beaucoup de business men qui sont juste là pour deux, trois jours. Ils sont ici pour vivre une expérience de luxe et de plaisirs diverses, l’escorte fait partie de cette expérience.


Les autres sont tous très différents, mais avec le même énorme besoin d’affection, de reconnaissance.


C’est pour ça que la plupart du temps, il n’y a même pas de sexe : c’est une sortie, puis un moment où ils parlent, et je dois les écouter, les comprendre et faire en sorte qu’ils se sentent bien en ma compagnie.


Parfois, il y a des câlins, des massages. Quand la relation sexuelle a lieu, je suis en droit de poser mes conditions : si je refuse quelque chose, ils n’ont en général pas trop de mal à l’accepter. Je fais en sorte que les choses restent agréables pour moi. Je me protège toujours, sans exception.


Je me préserve également des souffrances. Si je sens que l’un des deux commence à trop s’attacher, je mets un terme aux rendez-vous.


Je ne crois pas qu’un amour véritable puisse naître d’une telle relation. »


« J’ai appris à me moquer du regard des autres »


« Même si au début j’avais peur de le dire, aujourd’hui, une partie de mon entourage est au courant de ma « double vie ». Je ne l’ai toujours pas dit à mes parents : je pense pouvoir le dire à ma mère, mais mon père est trop protecteur pour l’accepter, je préfère donc ne rien leur dire pour l’instant.


Je l’ai vite dévoilé à mes amis proches : difficile de cacher la réalité aux gens que l’on voit tous les jours. A ceux que je ne sens pas assez ouverts d’esprit, je dis que je fais des ventes à domicile, ce qui justifie mes déplacements fréquents.


En général, ils ne posent pas trop de questions. Au pire, s’ils l’apprennent, j’ai appris avec le temps à me moquer du regard des autres. Mes amis qui sont au courant ont eu un peu de mal à digérer la nouvelle au départ, mais maintenant qu’ils ont compris que cela me convenait parfaitement, ils l’acceptent sans problème.


Beaucoup me demandent comment je ferai lorsque que j’aurai un petit ami, et que celui-ci n’acceptera pas mon travail. La réponse est simple : le jour où je rencontrerai quelqu’un dont je tomberai vraiment amoureuse, je lâcherai mon travail sans problème. Je n’aurais pas besoin de ce travail éternellement.


Pour l’instant, ce jour n’est pas arrivé. En tout cas, ce qui est sûr, c’est que ce ne sera pas quelqu’un rencontré dans le cadre de mon travail d’escorte ! »


« En rétrospective, je ne regrette rien ! »


« En résumé, si je devais résumer mon travail, je dirais juste qu’il faut savoir être sûre de soi, et sûre de ce que l’on veut. Il ne faut pas avoir peur de s’affirmer si l’on ne veut pas se faire marcher sur les pieds.


Je ne vais pas vous dire que c’est un métier où tout est rose tous les jours, mais après tout, est ce qu’il existe vraiment un métier où tout se passe toujours pour le mieux ? »


Note de Diana

Je tiens à préciser que cet article est un témoignage. Féministe dans l'âme, et bien que je puisse comprendre les motivations et raisons de Carlie, je ne cautionne pas tout pour autant. Cependant je salue la prudence de cette dernière. Bref, si je trouve le point de vue intéressant à partager, je ne pourrait pas faire ce métier. Libre à chacune se faire sa propre idée et de se lancer.
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